Une loi sur l'eau avant l'été ? Faut-il en rire ? Après Dominique Voynet, Yves Cochet, Roselyne Bachelot et Serge Lepeltier, c'est à Nelly Olin qu'est revenue la tâche désormais rituelle d'annoncer le nouveau report de l'examen par l'Assemblée nationale du projet de loi sur l'eau. Alors qu'il était prévu au mois de février, cet examen en seconde lecture est désormais repoussé au mois d'avril. En réalité, il n?interviendra dans le meilleur des cas qu'entre le début du mois de mai et la fin du mois de juin prochain. C?est dire que compte tenu de l'étroitesse de cette fenêtre et des aléas liés à l'encombrement du calendrier parlementaire, le report du projet au-delà des échéances électorales - voire son ajournement pur et simple - ne sont plus exclus. Conscients du danger, les acteurs de l'eau réagissent. Le Comité national de l'eau, volant au secours de la Ministre de l'écologie, a ainsi voté le 5 janvier dernier une motion adressée aux présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale demandant que l'inscription de la loi sur l'eau au calendrier parlementaire permette l'adoption de la loi « avant l'été ». Certaines organisations professionnelles comme la Fédération Nationale des Travaux Publics et Canalisateurs de France s'inquiètent désormais ouvertement et insistent sur « l'impérieuse nécessité » pour l'Assemblée nationale d'examiner « rapidement » le texte. La ministre de l'écologie elle-même a tenu à réaffirmer sa détermination : « Ma priorité absolue est l'adoption définitive du projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques avant l'été » a-t-elle indiqué le 5 janvier devant le Comité national de l'eau. « Nous regrettons tous ici le décalage au-delà du mois de février de son examen à l'Assemblée nationale. Cette loi a été longuement concertée et négociée. Elle répond aux nombreuses questions des élus et complètera la boite à outil indispensable à l'application de la directive cadre européenne. Elle doit maintenant voir le jour. Je peux vous redire toute ma détermination sur ce dossier. Je ne baisserai pas les bras ». Reste qu'après huit années de débats sur la réforme de notre politique de l'eau, après plusieurs dizaines de moutures différentes, abandonnées puis relancées pour être finalement reportées, il ne se trouve plus grand monde pour croire à l'adoption prochaine d'un texte susceptible de réformer en profondeur notre politique de l'eau. Faute d'une véritable ambition portée par une volonté politique forte, le temps des grands textes fondateurs et consensuels, dans la lignée des lois de 1964 et 1992, semble révolu. Paradoxalement, les tensions actuelles qui pèsent sur la rareté comme sur la qualité de la ressource et la nécessité de se doter d'outils appropriés pour mettre en ?uvre la directive cadre sur l'eau ne suffisent pas à faire figurer la politique de l'eau parmi les priorités du moment. C?est donc plus probablement par petites touches que se fera l'évolution de notre cadre institutionnel et règlementaire. On l'a vu ces derniers mois sur plusieurs dispositions comme celle concernant le financement de la coopération décentralisée dans le domaine de l'eau et de l'assainissement. Plus récemment encore, c'est une autre des dispositions contenues dans le projet de loi sur l'eau, celle autorisant les communes et leurs groupements à utiliser le budget général pour financer la création des Services publics d'assainissement non collectif, qui a pu voir le jour portée par un autre texte, en l'occurrence la loi de finances pour 2006 adoptée le 30 décembre dernier.